• K - Only Human


    Douleur physique


     

    - « Assurément, votre jeune frère aura besoin de points de suture. » déclara promptement le docteur qui était assis en face de Gabriel. « Il n'y a rien d'autre à faire face à cette vilaine blessure. Heureusement M. LOISEAU que vous avez su faire un bandage correct et que cela a stoppé le saignement. » Il se racla la gorge et rajouta rapidement. « Bien que cela ne saignait pas énormément étant donné que la blessure est à l'articulation. Et je dois rajouter que votre jeune frère a de la chance que des bouts de verre ne se soient pas enfoncés plus loin dans les nerfs... »

    Il y eut un court silence, assez pesant, après les mots du docteur qui examinait Gabriel.

    - « Et... Et quand cela se passera-t-il, docteur ? » demanda d'une voix anxieuse Kris.

    Gabriel eut une grimace lorsque l'adulte passa sa main sur la blessure. La douleur commençait à se faire de plus en plus sentir. Cette douleur qui au départ était insignifiante, commençait à se manifester de plus belle. Comme pour lui rappeler sa bêtise, sa tristesse face à ce qui lui était - encore une fois - arrivé.

    Kris s'en fait vraiment pour moi. Ai-je été aussi aveugle que ça ? Il faut toujours que ce soit lui qui se manifeste en premier. Alors que ce devrait être moi, étant donné que je suis... "celui à plaindre" si on peut vraiment dire ça.

    - « Vous parlez de l'opération ?... Eh bien, dans la journée je pense. Vous devrez l'amener à l'accueil pour l'inscrire, il sera conduit par une infirmière dans un chambre et l'opération se fera lorsqu'une place se présentera. »

    Kris hocha gravement la tête. Semblant s'enfoncer dans son crâne, ressassant sans cesse ses pensées.

    - « Cela va-t-il durer longtemps ? » demandai-je au docteur, prenant pour la première fois la parole depuis notre arrivée à l'hôpital.

    - « L'histoire d'une heure tout au plus. » répondit en souriant doucement le docteur, comme pour rassurer le jeune homme.

    Quelques minutes plus tard, le docteur sortit après avoir discutté un peu avec Kris. Ce dernier soupira, laissant derrière lui un silence gênant.
    Kris s'approcha de son frère et lui prit la main doucement. Sans le regarder dans les yeux, fixant plutôt leurs mains jointes, il dit :

    - « C'est bon ? Ca va ? Pas trop peur ? »

    Gabriel secoua négativement la tête, les yeux baissés vers le sol.

    Non, je n'ai pas trop peur de l'opération. Ce dont j'ai peur par contre, c'est de ne pas savoir faire la part des choses et que je recommence à trop t'en vouloir. Bien que ma rancune envers toi ne soit pas totalement partie...

    - « Je... » commençai-je, peu sûr de savoir quoi dire.

    - « Oui ? » me répondit-il. Je remarquais l'éclat brillant de ses yeux, avide de savoir ce que j'allais lui dire.

    - « Je... » Je dois lui dire le fond de ma pensée. Il faut qu'il sache pourquoi je lui en veux. Ca ne doit pas rester ainsi ! J'ai envie que ça change ! « Je... » Allez merde ! Ca doit sortir ! « Je commence à avoir mal à la main... » Je suis pathétique... Vraiment.

    Gabriel rentra sa tête dans ses épaules, son visage abattu par le remord s'affichant clairement.

    Kris sourit doucement, comme pour l'encourager. Il lui caressa doucement le visage - comme il aimait souvent le faire depuis ce matin - et lui fit lever les yeux vers lui.

    - « Viens, nous allons voir les infirmières. » dit-il doucement, sa déception se faisant imperceptiblement sentir malgré lui.

    Pourquoi est-ce que je fais ça ? Je devais changer ! Ca n'arrête pas !
    Eh merde ! J'ai vraiment mal !!

    Est-ce la douleur physique qui m'entraîne à vouloir pardonner mon frère ? Est-ce qu'elle me pousse à quelque chose que je ne veux pas ? Je ne sais plus.

    Non. La douleur physique entraîne à l'incompréhension. Elle m'entraîne à ne plus savoir réfléchir. Toutes mes pensées s'embrouillent... Je ne sais plus comment je dois réagir.

    Le visage de Gabriel ne reflètait maintenant plus que souffrance. Sa blessure à la main lui procurait une douleur amère qui se répandait bien au-delà de sa main, parcourant son bras et allant jusqu'à sa tête où un horrible crâne se faisait sentir, amenant Gabriel à s'appuyer un peu plus contre son frère.

    Merde enfin ! Gabriel le naïf est mort ! Je l'ai moi-même dit ce matin ! Pourquoi est-ce que je ne tiens pas ça en compte ?
    Mon frère s'en fait pour moi, c'est vrai ; il veut m'aider, c'est vrai aussi et je le crois ; mais ce dont je suis sûr, c'est qu'il ne comprendrait pas... ou peut-être que si, mais je ne veux rien risquer. Ma blessure au coeur me tuerait si je me rendais compte que Kris ne saurait comprendre.

    Kris attrapa plus fortement l'épaule de son jeune frère et le maintint tout contre lui pour lui assurer son équilibre.

    - « Tu sais... » commença-t-il doucement après que les infirmières aient donné à Gabriel un anti-douleur. « Je suis là. »

    Tout était dit. C'était ça. Gabriel aurait voulu l'entendre encore et encore cette phrase. Il aurait aussi voulu l'entendre dans le passé. Mais c'était ainsi et rien ne pourrait modifier le passé.

    Tout ce qui comptait maintenant c'était l'épaule de son frère, son souffle sur sa tête, la chaleur de ses mains sur son bras et sur sa main...
    Malgré la torpeur qui l'emportait doucement, Gabriel réussit à demander d'une voix basse que seul Kris pouvait entendre dans la petite pièce qui leur était réservée.

    - « Tu m'en veux ? » Suis-je con ? Bien évidemment qu'il m'en voudra ! Il m'a engueulé ce matin et le fait que j'ai pleuré - mon Dieu, faites-moi oublier ça ! - ne va rien changer au fait qu'il ne m'en voudra pas ou non.

    Kris fronça les sourcils. Il regarda longuement Gabriel qui ne cessait de stresser en attendant la réponse à sa question.

    - « Pas maintenant Gabriel. Pas maintenant. » Il lui tapota la tête pour qu'elle se repose sur son épaule.


    Kris reposa Gabriel dans son lit en essayant de faire le moins de bruit possible.
    Il entreprit de nettoyer les dégâts du matin.

    Alors qu'il passait l'aspirateur dans la salle de bain, il en vint à la pensée suivante qu'il murmura pour lui-même.

    - « Et toi ? Est-ce que tu m'en veux ? »


    Humeur du moment : Rien à ajouter.
    Lis : Fic yaoi Pour la vie.
    Ecoute : SuperHero de miyavi.
    Regarde : Guin Saga


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